La production participative, connue également sous le terme anglais Crowdsourcing, représente la nouvelle donne dans l’externalisation du travail. Plutôt que consulter des cabinets ou faire travailler des agences, plutôt que solliciter à nouveau ses salariés, et si l’entreprise se tournait d’abord vers la « foule », the crowd ? Qu’est-ce que la production participative ? Coup de projecteur sur ce nouveau concept collaboratif qui profite de l’ère du numérique.
La production participative : naissance du phénomène
Alors pour une fois, ne parlons pas anglais et restons sous l’étendard français pour évoquer et définir la production participative. Cette expression est l’équivalent du mot anglais crowdsourcing, créé de toute pièce, un néologisme donc, en 2006 par deux journalistes américains, Jeff Howe et Mark Robinson. Il se traduit littéralement par « approvisionnement par la foule ».
Tous deux mettent en exergue ce principe novateur qui consiste pour une entité (soit une entreprise) à externaliser auprès de plusieurs individus anonymes des tâches. La nouveauté réside dans le fait qu’habituellement ce sont les salariés en interne qui auraient effectué ces tâches : on fait appel pour la première fois à l’intelligence et l’innovation collective.
Ce phénomène est d’autant plus accentué avec internet qui gomme les distances et ouvre largement le champ des possibilités.
Le but de la production participative ? Chercher et trouver (tant qu’à faire) un maximum de compétences en dehors de l’entreprise.
Quand la production participative sème le trouble
Si le principe est innovant, qu’en est-il de l’organisation et du travail ? Qu’advient-il du périmètre de l’entreprise ? Où les limites de celle-ci s’arrêtent-elles ? Quelle est la légitimité des salariés ?
Il faut aussi citer l’aspect financier de ce procédé de travail. Certaines activités sont rétribuées, d’autres ne le sont pas ou sous forme de prix et de cadeaux. On peut s’interroger sur la légalité de ces pratiques. Est-on davantage en présence de volontariat ou d’une véritable prestation intellectuelle qui doit engendrer une rémunération à hauteur du service rendu ?
À ces questions, s’ajoute également le risque moral : contractuellement, que représentent la « foule » et chaque individu qui la compose ? Certains, notamment les profils juniors, y voient la possibilité d’un potentiel recrutement. Quelle n’est pas leur déception une fois le concours achevé et les gains distribués !
Alors oui, la production participative a tendance à effacer les frontières d’une organisation, mais pas seulement : même les distances entre statuts s’estompent. On peut dans cette configuration voir se défier un cadre dont l’ancienneté et les compétences ne sont plus à prouver avec un jeune expert à l’autre bout du monde. De quoi largement semer le trouble !
Les avantages et les inconvénients de la production participative
Une fois ces questions soulevées, qui attendent sans conteste quelques réponses et un cadrage plus fin, revenons au concept et voyons ses avantages et ses inconvénients.
Les avantages du procédé
Puisque le principe est de collecter des idées en vue de la sortie d’un nouveau produit, les avantages sont évidemment multiples :
- Les personnes qui contribuent au projet peuvent travailler dessus H24, de quoi garantir le succès de la mission.
- Recourir à des ressources externes établies sur la toile fait gagner non seulement du temps, mais aussi de l’argent.
- Solliciter la foule pour recueillir ses bonnes idées ne se fait pas sans une communication bien ficelée autour. Fonctionner ainsi favorise le gain de potentiels clients.
- Les participants eux-mêmes, intéressés par la marque deviennent des ambassadeurs hors pair : on est véritablement au cœur d’une stratégie marketing participatif.
Les inconvénients de la production participative
Et comme pour tout, les points négatifs ne tardent pas non plus à émerger. Hormis les questionnements énoncés plus haut, il apparait deux autres inconvénients :
- Les innovations produites par une main-d’œuvre « bon marché » sont-elles suffisamment crédibles ? La foule est donc davantage cantonnée à des tâches simples.
- La gestion de centaines voire davantage de travailleurs est considérable. Le dilemme est : faut-il mobiliser du temps et des salariés sur le lancement d’un nouveau produit ou pour accompagner et gérer les externes qui eux, sont désignés pour travailler sur le projet ?
Les types de production participative
3 grands types de production participative apparaissent. Synthétisés sous forme de tableau, il est plus aisé de les assimiler et d’en comprendre les nuances.
Rôle de la foule | Configuration | Type de récompense | Taille de la foule | Diversité de la foule | |
---|---|---|---|---|---|
Crowdsourcing d'activités routinières | Apport de temps et de capacités de calculs | intégratif (division du travail) | Micro-paiements | Très importante | Très importante |
Crowdsourcing de contenus | Apports de contenus (données et informations) | intégratif (division du travail) | Micro-paiements (ou aucune) | Très importante | Très importante |
Crowdsourcing d'activités inventaires | apport de solutions, d'idées et de connaissances | Sélectif | Peut être très élevée | Importante (mais indirectement) | Très importante |
Les plateformes
Sans les plateformes, pas d’externalisation et de production participative possible. Celle-ci favorise la mise en relation des entreprises avec la foule lors de la formulation d’un appel à création. Ces portails sont indispensables pour la diffusion des annonces, l’organisation et la gestion des paiements (primes, cadeaux, prix, micro paiements). Voici quelques grandes plateformes désormais largement plébiscitées dans les domaines du marketing et de la conception produit notamment :
- Doz.com : la plateforme est capable de mobiliser une foule d’experts à travers plus de 15 pays. Les géants comme Google, Microsoft ou encore Red Bull y ont régulièrement recours lors de lancement de campagnes à l’étranger.
- Creads : c’est une plateforme destinée aux créatifs, qui compte dans ses rangs plus de 50 000 profils.
- eYeka : 160 pays, 400 000 créatifs composent la communauté eYeka. Des marques comme Philips ou Ferrero Rocher font appel à cette plateforme.
- 99 Designs : c’est une plateforme artistique, orientée sur la modélisation graphique.
Le crowdsourcing et les autres…
Il faut croire que le crowdsourcing a fait des émules et a tracé la voie à d’autres formes d’expérience collaborative ! Et si le crowdsourcing en effet n’était donc pas la seule façon de rentrer en contact avec une communauté d’experts anonymes ?
- Connaissez-vous le crowdtesting ?
Propre au domaine du digital, il est destiné aux créateurs d’entreprises. Le principe est de leur permettre d’approcher des bêta-testeurs de toute nationalité et aux profils variés afin de procéder à l’analyse de bugs, à des tests ergonomiques et de fonctionnalités de produits digitaux.
- Avez-vous entendu parler du Crowdrating ?
Littéralement, l’évaluation par la foule consiste à tester l’engouement et la réceptivité de celle-ci envers un nouveau projet et/ou un produit.
- Et enfin, le crowdfunding ?
C’est la plus connue des pratiques participatives, où il s’agit de solliciter la foule pour financer un projet, soit de création d’entreprise, soit de développement.
La production participative est un concept bel et bien ancré désormais dans les grandes entreprises. Si elle favorise la création de communautés, le partage d’informations, la rencontre de nouvelles ressources inexploitées, elle draine aussi de vifs commentaires. Bénévolat déguisé ou véritable service freelance ? Quel est votre avis ?